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Dermite Equine
7 février 2015

Quelle molécule ?

Pourquoi est-ce si difficile de trouver un répulsif ou insecticide qui marche ? En théorie et dans des conditions optimales ils fonctionnent tous pas mal, mais chez les chevaux on est pas dans des conditions optimales.

  1. Le cheval transpire, le produit se barre avec la transpiration
  2. du coup il faut en remettre tout le temps et on est pas nombreux à pouvoir venir toutes les deux heures pschitter notre cheval
  3. ce sont des produits toxiques, le seuil efficace est susceptible d’être aussi le seuil de toxicité pour le cheval.

Donc, comment choisir son répulsif ? Le packaging (ironie), l’odeur, le prix, c’est très important. Mais ça ne joue pas sur l’efficacité du produit. Le plus important, c’est sa composition. On peut distinguer déjà deux types de répulsifs : les dits « chimiques » et les dits « naturels ».

LES REPULSIFS NATURELS

On va commencer par les naturels, comme ça après on pourra passer aux choses sérieuses. Oui, le naturel « c’est joli, ça sent bon, ça vient de la nature et la nature elle est bonne donc le naturel ça peut pas être mauvais ».

J’en profite pour mettre en avant quelque chose qu’on entend souvent : c’est naturel, c’est pas dangereux. Alors non, nos chevaux sont allergiques à des culicoïdes qui viennent de la nature, et il existe des gens mortellement allergiques aux cacahuètes, naturelles. La nature peut être aussi cruelle et dangereuse que nos ingénieurs pharmaceutiques qui tuent les gens avec des médicaments pour diabétiques ou des prothèses mammaires mal foutues. Ok ?

Donc, pour revenir à nos moutons, les répulsifs naturels sont le plus souvent à la citronnelle, à la lavande, au vinaigre ou à l’ail même … Sous forme de sprays, de bracelets ou de bougies senteur (moins utiles pour nos amis les chevaux ceux-là). Mais il faut savoir qu’ils sont nettement moins efficaces, voir pas efficaces du tout. Dans le meilleur des cas les études leur donne 2 heures d’efficacité, dans les pires cas, aucune efficacité. Donc la citronnelle ça va pour monter, mais au pré ça ne servira à rien. Vous comprendrez aisément que si ça peine à protéger un humain qui dine dehors un soir, ça va pas aider nos poneys qui vivent dehors !

LES REPULSIFS CHIMIQUES

Du coup on passe aux répulsifs chimiques. De quoi sont-ils faits ? On ne va pas détailler la composition exacte bien sur, mais seulement le principe actif. Il varie peu : DEET, IR3535 ou icaridine (en gros, selon Que Choisir)[1]. Toujours selon « Que Choisir », « les produits les plus efficaces sont à base de DEET, à 30 ou 50 % ». L’efficacité de l’IR3535 dépend de la composition du reste du produit qui semble agir sur l’efficacité de la molécule. Et l’icaridine est d’une efficacité moyenne. Les laboratoires annoncent une durée de protection de 8 heures mais les tests de Que Choisir montrent plutôt 4 heures de protection. Une alternative au répulsif à même la peau est le répulsif à vaporiser sur les vêtements, donc pour nos loulous sur les couvertures anti-mouches. La tenue est plus longue, cela nous revient bien moins cher !

Au cas par cas :

  • Le DEET n’est pas sans danger ! « Le DEET présente une toxicité avérée pour le système nerveux des mammifères. Une étude d'août 2014 parue dans la revue BioMed Central Biology explique que le DEET inhibe l'acétylcholinestérase, une enzyme cruciale dans l'échange d'information entre les cellules nerveuses. "En effectuant des tests, nous avons constaté que des moustiques mouraient, ce que l'on observe avec un insecticide mais normalement pas avec un répulsif, a expliqué Bruno Lapied, un des promoteurs de l'étude.  L'action du DEET est comparable à celle des pesticides[2].  On voit d’ailleurs que les produits à base de DEET le sont à 30 - 50%, alors que le Canada a interdit la vente de produits à plus de 30%. Je répète donc, l’application d’un répulsif à base de DEET sur la couverture anti-mouches plutôt que sur le cheval lui-même ne peut être que bénéfique ! Je rajoute que tout ceci est basé sur des tests sur les humains, je n’ai pas (encore) trouvé de résultats d’étude de DEET sur les chevaux.
  • Il me semble important de parler de la perméthrine, aussi contenue dans certains répulsifs. C’est aussi l’anti-moustique qui est utilisé dans la couverture Horseware Rambo Vamoose (170€ chez Kramer), imbibée de répulsif. La perméthrine fait partie de la famille des pyrèthres qui peuvent, s’ils sont utilisés à des doses trop importantes ou avec des excipients les faisant pénétrer dans l’organisme, provoquer des intoxications[3]. Elle fait donc partie des molécules qu’il vaut mieux ne pas trop respirer et ne pas trop mettre en contact avec la peau quand on la vaporise sur un vêtement. Et qui dit propriétaire de dermiteux, dit amoureux des animaux donc attention : la perméthrine n’est pas du tout, du tout, du tout, supportée par les chats et peut leur être fatale !! Idem pour les poissons, attention à ne pas polluer les cours d’eau ![4] Mais ne la diabolisons pas, elle semble efficace si bien utilisée ! Marc de Fonseca (vétérinaire belge qui a écrit un carnet sur la DERE, décédé le 1er aout 2014, nous le remercions pour ce carnet) recommande l’usage suivant : en pour-on (le long de la colonne vertébrale) toutes les 2 semaines, 25 ml à diluer dans 5 litres d’eau. Claire Chouilly-Crouail, qui a fait sa thèse vétérinaire sur la dermite, a conclu qu’un traitement à base de perméthrine, rigoureux et contraignant, se révèle efficace pour 68% des chevaux (sur 25 chevaux)[5]. Cependant, en utilisant le produit dont elle se sert dans son étude (un produit pour chiens) avec 2mg de perméthrine, ça revient très cher (dit-elle, prix non précisé, mais plusieurs flacons pour la saison).
  • Marc de Fonseca recommande de ne pas utiliser de deltaméthrine ou de formamdine, il a observé qu’elles causent des réactions chez beaucoup de chevaux (irritations, somnolence, ataxie, colique, dépression…).

 



[3] Carnet d’un vétérinaire du cheval - Gâle d’été, M. de Fonseca, http://users.skynet.be/equithea/docveto/Carnet4.pdf p.23

[4] Dermatoses parasitaires chez le cheval : approche diagnostique et thérapeutique. Sophie Le Ray, le 30 juin 2010

[5] La DERE : étude diagnostique et thérapeutique sur une population de chevaux atteints, C. Chouilly-Crouail, 2003, http://kentika.oniris-nantes.fr/GEIDEFile/na_03_046.pdf?Archive=193303591158&File=na_03_046_pdf p. 93

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